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Appel à article « Informalité politique, pouvoirs et envers des espaces urbains », Espace politique, pour le 15/01/16 (extension du délai)

Numéro spécial de l’Espace politique, coordonné par S. Jacquot, A. Sierra et J. Tadié. Pour plus d’informations, voir ci-dessous ou sur le site de la revue: espacepolitique.revues.org/3434.

 

Main basse sur la villeChinatownTroupes d’élites, … autant de films qui montrent l’empreinte des logiques informelles voire criminelles à Naples, Los Angeles ou Rio de Janeiro. Au-delà de ces symboles, les logiques informelles mettent en évidence fonctionnements urbains et pouvoirs divers. Clientélisme, attributions obscures de marchés publics, collusion, circulation de rumeurs, formes d’organisation plus ou moins autonomes de quartier (autogestion, lynchages, comités de vigilance, contrôle de marchés par des caïds, etc.), résistances (en tant que mobilisations en dehors des champs institutionnels), rackets organisés, toutes ces pratiques renvoient au gouvernement informel de la ville. Ce numéro a pour but de comprendre le rôle et l’évolution des logiques officieuses dans le gouvernement des villes. Comment émerge et se maintient une pluralité de pouvoirs en ville de façon informelle voire illégale ? Quel rôle jouent-ils dans la production, l’administration et le contrôle de la ville ?

En appliquant la notion d’informalité, qui caractérisait jusqu’à présent davantage le champ économique, au domaine politique, cet appel à contributions vise à explorer la prégnance et le rôle des arrangements et des pratiques non officielles voire transgressives en ville, comme un envers urbain. Ainsi, la notion d’informalité politique appelle à dépasser la seule référence au cadre juridique et à sa transgression. Elle saisit plus largement les normes sociales en usage, auxquelles s’articulent les pouvoirs en ville. Cette informalité politique recouvre « les formes, les pratiques, les activités, les expressions qui, faute de bénéficier d’une reconnaissance et d’une légitimité de la part des prescripteurs et des agents les plus influents du champ, sont « rejetés » en dehors de ce champ quand bien même elles participent, pleinement ou accessoirement, à sa constitution » (Le Gall, Offerlé et Ploux, 2012, p.16).

Dans cette perspective, l’informalité propose un autre angle d’approche aux questions de l’élaboration des politiques publiques dans des contextes où ne sont souvent pris en considération que les phénomènes officiels et visibles (dispositifs participatifs, décentralisation), sans prendre en compte les pratiques sous-jacentes, plus implicites, telles que la corruption ou le clientélisme. Il s’agit ainsi d’identifier des dynamiques politiques en dehors ou en contournement des pratiques officielles du pouvoir.

Dès lors, l’étude de l’informalité politique propose aussi une enquête sur les pouvoirs urbains, dans leur diversité, à travers leurs pratiques, articulations, modes de visibilité et registres de légitimation. Elle peut révéler le rôle des habitants, des leaders, des élites politiques ou économiques, en interaction ou non. Quels arrangements, tolérances, contournements, rendent possibles ces pratiques ? Ces pouvoirs sont-ils tous articulés à un gouvernement (Etat, pouvoir décentralisé, coalition locale dominante, etc), face auquel ils se situent et avec lequel ils nouent des alliances, ou bien peuvent-ils constituer des formes autonomes ou concurrentes de pouvoir en ville, plus ou moins déconnectés des sphères les plus institutionnalisées, produisant des espaces différenciés ? Autrement dit, l’informalité politique est-elle productrice de pouvoirs et d’espaces aux normes de fonctionnement différent ?

L’objectif n’est néanmoins pas d’opposer une sphère légale dominante à des sujets marqués par des pratiques politiques informelles : il s’agit plutôt d’identifier les modalités de la construction d’espaces politiques voire du politique, soit dans les marges de l’intervention urbaine, soit par l’entrée dans les jeux politiques à partir d’enjeux urbains spécifiques ou dans la pratique quotidienne du gouvernement de la ville. De fait, l’informalité politique, qui se traduit par une variété d’arrangements, concerne aussi bien les citadins disposant de peu de ressources et d’accès aux sphères dominantes, que les intermédiaires et élites. Ces arrangements révèlent des fabriques de la ville, par leurs articulations originales à l’espace urbain.

Ce numéro se place ainsi dans un double contexte, celui des études urbaines – souvent centrées sur les seules dynamiques et politiques « officielles » – et celui des études sur l’informalité – trop souvent cantonnées aux villes du Sud et au domaine de l’économie, ou d’une criminalité instituée. Nous encourageons les articles qui mobilisent des enquêtes de terrain, dont les éléments empiriques offriront dans la composition du numéro des mises en perspective comparatives. Les articles pourront ainsi traiter des thèmes suivants (il s’agit d’une liste non exhaustive et non cloisonnée) :

1. informalité politique, pratique(s) et signification du droit en ville : les propositions peuvent examiner la façon dont la loi et les règles sont interprétées et transgressées dans la gestion quotidienne de la ville, en analysant les pratiques à l’origine de ces contournements (faveurs, clientélisme, népotisme, corruption, etc.), ainsi que les acteurs impliqués (autorités publiques et acteurs privés, entreprises, lobbys, mafias et citadins).

2. informalité politique et gouvernements urbains : le gouvernement urbain peut-il être relu au prisme de l’informalité politique ? Comment se forment et se maintiennent des collectifs d’habitants, des coalitions d’acteurs publics et privés ou de partis ? L’Etat lui-même a-t-il recours à des registres informels dans la gestion de la ville ?

3. informalité politique et citadins en résistance : au-delà des sphères institutionnelles de la mobilisation et contestation politique, quelles pratiques informelles constituent des remises en cause des pouvoirs urbains établis ? Quels sont les registres d’action politique des citadins dépourvus de droits politiques reconnus ?

4. les espaces au fonctionnement informel : Certains espaces relèvent de fonctionnements informels, tenus par des pouvoirs alternatifs, éventuellement d’origine criminels. Comment se maintiennent-ils, s’articulent-ils aux pouvoirs établis, et construisent-ils, sinon leur légitimité, du moins leur acceptation auprès des citadins ?

5. la place des savoirs pratiques dans l’informalité politique : Quels savoirs pratiques sont mobilisés dans la conduite d’arrangements informels ou le contournements de règles ? Comment des rumeurs, légendes, constituent aussi une dimension essentielle de l’informalité politique ?

6. arrangements et temporalités : y a-t-il des moments favorables au développement de ces arrangements, des lieux privilégiés pour les négocier, les conclure ou les remettre en cause.  Ils sont menés à partir de contextes, de représentations de la ville et s’appuient sur des réseaux parfois changeants. Quelle est donc la possibilité de leur pérennité ?

Calendrier

Les articles sont à adresser à Sébastien Jacquot (sebastien.jacquot@univ-paris1.fr), Alexis Sierra (a.alexis.sierra@gmail.com) et Jérôme Tadié (jerome.tadie@ird.fravant le 15 janvier 2016. Merci de nous envoyer une intention de participation au numéro d’ici le 15 décembre 2015.

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